La résistance rapproche, ou pas. (Bahorel)

La révolution avait laissé beaucoup de séquelles, pour tout le monde. Grantaire aimerait bien pouvoir affirmer que ce n'était pas le cas pour lui, sauf que très clairement il avait le sentiment de ne plus être la même personne. Oh il n'avait pas non plus trop changé, pas au moins de ne pas rendre ressembler à qui il était, mais il avait bien remarqué quelque changement. Surtout dans sa vision de sa propre vie, dans son envie de faire quelque chose de cette dite vie. Le jeune homme aimerait bien donne un peu plus de sens à son existence, même si en un sens il avait conscience que pour cela, il devait juste continuer sur la même lancée qu'il avait présentement.

Celle de tout simplement se battre pour la bonne cause. Maintenant, le jeune homme pouvait simplement se battre pour de vrai, en croyant vraiment à ce qu'il défendait. C'était ici la grande différence, le jeune homme se disait qu'il allait juste se battre réellement en croyant vraiment à cette cause. Alors qu'il l'avait mis en doute tellement de fois, qu'il avait charrié les amis de L'ABC en affirmant qu'il ne se contentait sur de brasser du vent. Peut être qu'il n'avait pas entièrement tort non plus. Mais en même temps. Il avait conscience qu'ils pouvaient quand même vraiment changer les choses.

Cela dit ce n'était pas parce que Grantaire avait conscience de certaines choses maintenant, dont certaines qu'il n'avait pas spécialement envie de s'avouer en réalité, qu'il allait complètement changer ses habitude pour autant. Il se rendit au café musain, cet endroit qui avait eu quand même énormément d'importance pour la révolution qu'il n'avait pas gagné, mais qu'ils pouvaient encore récupérer à leur cause. Il avait l'intention de s'y rendre dans le but de boire de l'alcool. Il n'allait pas entièrement de retenir, il ne pouvait pas même s'il le voulait. Il buvait moins quand même, vraiment, comparé à avant – en même temps ce n'était pas difficile –, mais il était impossible pour lui de ne pas boire du tout. Alors il se rendait dans ce café pour ce vin qu'il adorait tant, mais aussi pour Louison. La belle serveuse qui l'avait embrassé quand même sauf que quand il arriva sur place, ce ne fut pas elle qu'il trouva derrière le comptoir, pour sa grande déception. Le jeune homme prit quand même un verre de vin, parce que c'était en grande partie pour cela qu'il venait ici, avant de regarder un peu la salle. Ce fut à ce moment là que son regard tomba sur le frère de la serveuse.

« Ah Bahorel ! » Lanca-t-il en s'approchant de l'homme en question, s'installant à ses côtés. « Je ne t'avais pas vu depuis la grande… bataille ! Comment te porte tu mon ami ? »

Grantaire parlait vite, il parlait fort et très clairement il exagérait un peu les choses. Bahorel et lui étaient loins d'être des amis proches, mais en même temps tous les camarades de combat avait un peu de mal avec lui. Ce qu'il pouvait comprendre, il avait dû mal avec eu.

Grantaire afficha un sourire en entendant son interlocuteur affirmer qu’il se sentait bien malgré les circonstances. C’était un peu la réponse de tout le monde depuis cette grande bataille où ils avaient quand même sacrément frôlé la mort. Ils ne l’avaient même pas frôlé, c’était plus que cela, c’était à se demander comment ils avaient réussi à s’en sortir vivants. Mais ils l’étaient bel et bien et ils avaient une nouvelle chance devant eux. Le jeune homme ne savait pas encore comment les choses allaient se passer, il ne savait pas comment ils allaient agir maintenant. Mais ils verraient bien sans doute.

Bahorel affirma qu’il n’avait pas perdu sa bonne humeur apparemment, ce qui tira de nouveau un sourire au jeune homme. Grantaire aimerait bien que ça soit vraiment le cas, mais il devait bien avouer qu’il n’était pas aussi bien qu’avant, qu’il n’était pas aussi insouciant qu’il n’était d’ordinaire. Grantaire n’avait pas spécialement envie de changer, mais il ne pouvait pas nier le fait qu’il ne pouvait pas non plus être exactement le même qu’avant. Mais si son camarade pouvait l’imaginer qu’il n’avait pas changé, c’était une bonne chose, ça lui allait très bien. Même s’il osait croire qu’au vu de la situation, Bahorel ne serait pas complètement dupe. Ils ne pouvaient pas avoir vécu tous ce qu’ils avaient vécu lors de cette bataille, sans avoir été gravement touché, en affirmant que tout allait bien maintenant, en ayant la même vie qu’avant.

« Eh ouais, il y a des choses qui ne changent pas comme tu peux voir. » Répondit-il en haussant les épaules.

Il aimerait vraiment être sincère, il avait vraiment envie de faire croire qu’il n’avait pas changé alors qu’en vérité, il était quand même profondément touché par la situation. Il avait une blessure grande ouverte, il avait été touché comme jamais… il avait conscience qu’il ne sera jamais plus le même et il avait même pris conscience de certaines choses.

« Dis-moi mon ami, ta magnifique sœur n’est pas dans le coin ? »

Ce n’était que la présence du jeune homme la dérangeait, mais effectivement il préférait quand même celle de la belle Louison. Bon, en soit, il pourrait très bien la voir plus tard, ce n’était pas si grave s’il ne pouvait pas la voir maintenant et s’il pouvait passer un peu de temps avec Bahorel c’était une bonne chose aussi. Après tout, il aimait bien son interlocuteur, il faisait parti de ces amis des Amis. Mais en fait… il espérait bien taquiner quelque peu le grand frère quand même. Il savait que Bahorel était protecteur avec sa sœur, et de son côté il aimait quand même très bien taquiner les autres.

Un large sourire se dessina sur les lèvres de Grantaire en entendant Bahorel répondre à sa remarque. Le jeune homme n’était pas spécialement étonné de la réaction de son interlocuteur, parce qu’il savait que le grand-frère était quelque peu protecteur avec sa jeune sœur. Et il savait qu’il risquait gros d’ailleurs à continuer de le taquiner, surtout qu’il y avait un fondement là-dedans. Grantaire ne savait pas encore complètement comment se positionner, mais ce qui était sûr, c’était qu’il y avait un rapprochement certain entre lui et Louison. Et qu’il avait… disons qu’il n’avait pas vraiment fait quoi que ce soit avec qui que ce soit depuis les barricades. Louison était une femme admirable pour beaucoup de point, même si Grantaire l’avait souvent taquiné comme il le faisait avec beaucoup de monde, il savait reconnaître toutes les qualités de la serveuse. Et en prime, elle avait pour grande qualité d’être une femme.

« Oh eh bien dis donc, c’est qu’on mordrait Bahorel ? » Répliqua-t-il en riant.

Il ne prenait pas mal du tout la réaction de Jonah, parce qu’il devait bien avouer qu’il l’avait un peu cherché aussi. Le jeune homme tenait à sa sœur, raison pour laquelle il lui en voulait d’ailleurs d’avoir été présente lors des barricades, ce qu’il savait parce qu’il avait eu l’occasion d’en parler avec la belle Louison justement. Ce n’était au fond qu’un besoin de la protéger, mais Grantaire avait bien envie de considérer que la jeune femme savait aussi très bien se défendre toute seule.

« Mais si c’est ta magnifique sœur qui s’approche de moi ? Que veux tu que je fasse dis donc ? »

Bon, d’accord, Grantaire ne devrait pas provoquer à ce point son camarade, mais qu’est-ce qu’il risquait en réalité ? Que Bahorel s’énerve et lui colle son poing dans le visage ? Après ce qu’ils avaient vécu sur la barricade, le jeune homme était d’avis que ça ne sera vraiment rien du tout. Il ne voyait pas ce qu’il pouvait lui faire de pire que la mort, à moins de décréter qu’il allait le tuer bien évidemment. Ce qui serait bête. Après avoir survécu à la mort auprès de Enjolras, ce serait idiot de mourir des mains d’un homme bien trop jaloux qu’on s’approche de sa sœur. Même si ça mettrait un point final digne de la vie de Grantaire.